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Souvenons-nous de Victor Biaka Boda

Naissance et combat de Victor Biaka Boda

C’est en 1913, dans le village de Dahiépa, dans la région de Gagnoa, que l’une des plus belles étoiles que la Côte d’Ivoire ait connue Victor Biaka Boda voit le jour. Très tôt orphelin de père et de mère, l’enfant de Dahiépa est recueilli et élevé dans la pure tradition bété par ses grands-parents maternels dans le village de Biakou.  En 1920 le jeune fils de Dahiépa se sépare de sa famille et prend la direction de Gagnoa pour commencer son parcours scolaire. À l’école supérieure de Bingerville, en 1930, il obtient son brevet d’étude primaire supérieur. Il prend ensuite la route de Dakar où il suivra des études de médecine, il en sortira avec le titre de médecin africain en 1937. Durant toute la durée de ses études, notre héros fait preuve d’une vive intelligence et se fait remarquer par son caractère frondeur et rebelle.

A sa sortie de l’école de médecine, notre nouveau médecin est affecté en Guinée. C’est au cours de son séjour en Guinée qu’il fait la rencontre d’un grand leader africain en la personne d’Ahmed Sékou Touré alors président de la section du RDA en Guinée. Le RDA est à cette époque le plus grand mouvement panafricain d’Afrique de l’ouest qui lutte pour l’émancipation de l’Afrique. Cette rencontre sera l’occasion pour le médecin d’adhérer au RDA. Epris de liberté et farouchement opposé aux injustices subies par son peuple, son engagement au sein du RDA n’est pas une surprise. C’est tout naturellement qu’il est admis au comité directeur du RDA en Guinée où il ne cesse de fustiger le colonialisme. L’administration coloniale va commencer à surveiller ce « révolutionnaire » qui, grâce à sa fougue oratoire, sème le trouble dans la colonie guinéenne. Mais c’est en Côte d’Ivoire, nom que le colon a donné à sa terre de natale, que le combat du jeune médecin va prendre une autre dimension. En 1947 il quitte définitivement la Guinée pour la terre de ses ancêtres.

Quand il retourne dans la colonie de Côte d’Ivoire, il rejoint dans l’arène du combat contre l’exploitation coloniale Jean-Baptiste Mockey, Ouezzin Coulibaly, Jacob William, Mathieu Ekra, Dignan Bailly ou encore Anne-Marie Raggie.

Combats politiques et disparition de Victor Biaka Boda

Élu sénateur en 1948 dans le cadre de l’union française, notre médecin s’envole pour la métropole française où il compte porter fièrement la cause des siens. Son passage au sénat français est salué par ses condisciples qui ne cessent de vanter ses talents d’orateur. Le fils de Dahiépa gagne le respect des sénateurs de part sa droiture et son intégrité. Mais dans la colonie ivoirienne les années 49 et 50 sont des années difficiles pour les combattants du RDA. En effet, l’administration coloniale a décidé de mener une lutte sans merci aux leaders du RDA, qui était encore à cette époque un parti anti-colonialiste. Tous les leaders de ce parti sont intimidés, arrêtés, brimés et emprisonnés. Les populations acquises à la cause du RDA sont tuées ; souvenons-nous de la répression de Bouaflé. C’est dans cette période trouble que notre sénateur revient sur sa terre pour continuer le combat sur le terrain. A son retour il est l’un des rares membres du RDA toujours en liberté, assumant son statut de leader. Il continue la lutte en fustigeant les dérives du colon et en sillonnant de nombreuses villes de la colonie ivoirienne pour prôner l’insurrection.

Le 18 novembre 1949, dans la ville de Daloa, il prononce un discours dont la virulence n’a d’égal que sa détermination à libérer la Côte d’Ivoire du joug colonial. Ce discours sera la goutte d’eau qui fera déborder le vase…

Le 27 janvier 1950, notre sénateur prend la route de Gagnoa. Après une panne de son véhicule à quelques kilomètres de la ville de Bouaflé, il décide de s’y rendre à pieds afin d’y passer la nuit. En arrivant il se fait héberger par l’Almamy Ali Diaby. Le sénateur ne se doute de rien mais un complot se prépare contre lui. En effet dans la nuit, des agents de l’administration coloniale viennent l’arrêter et lui infligent d’atroces tortures avant de l’achever dans un bosquet à proximité de Bouaflé.

Ainsi se termine le combat de l’honorable fils de Dahiépa, VICTOR BIAKA BODA .

Durant plusieurs années l’administration coloniale a refusé de communiquer sur la disparition du sénateur, refusant même de remettre sa dépouille à sa famille. Aucune sépulture digne de son rang ne lui sera offerte et aucun hommage national ne lui sera rendu. Victor Biaka Boda est un oublié de l’histoire de notre pays, très peu d’ivoiriens se souviennent encore de ce nom symbole de révolte et de liberté. Victor Biaka Boda fut un grand militant et une figure de proue de la résistance à l’oppression coloniale. Mort pour la lutte et pour son peuple, souvenons-nous du sénateur Victor Biaka Boda et de son combat. N’oublions jamais le sacrifice qu’il a fait pour nous.

Que l’Afrique retienne le nom de ses Héros.

NJA

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Auteur·e

njaone

Commentaires

Aly COULIBALY
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Ce billet est un cours magistral sur l'individu que biens d'ivoiriens connaissent de nom simplement.
Merci d'avoir partagé ce bout de notre histoire...

Zikehi
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Oui! On ira jusqu'au bout!

KISSIEDOU
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Tres belle histoire qui,ravive la flamme de la révolution moderne en nous..
Je pense à mon humble avis que notre combat à nous,jeunes conscients et éveillés d'Aujourd'hui ,c'est de coute que coûte de diffuser au maximum ces gens D'histoires afin de réveiller l'instinct d'émancipation en tous

Mawdo Diallo
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Un grand militant africain, jamais il n'aurait accepté la politique de collaboration avec l'administration coloniale (politique de trahison de l'Afrique) impulsée par Houphouet à partir de 1950. L'Afrique a perdu avec Biaka Boda un des ses fils les plus dignes
C'est un abject crime colonial français dans la lignée de ceux d'Um Nyobé, Félix Moumié, Mbalia Camara etc.